Un membre du MEDEF s’intéresse à l’économie sociale ? Non... car il ne faut surtout rien changer au systême !
Date de publication :
17 mai 2010 |
Mots clés :
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17 mai 2010 |
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Sur l’excellent blog de Rémi Laurent, on trouve un de ses billets titré : "Un entrepreneur membre du MEDEF fait la promotion de l’ESS". En effet, Thibault Lanxade, dirigeant de la société aqoba, membre du Comité Exécutif du Conseil pour la diffusion de la culture économique, ainsi que de la Commission des nouvelles générations au MEDEF, semble y parler de bonnes pratiques dans l’économie sociale, dont l’économie traditionnelle devrait (pourrait ?) s’inspirer.
Dans son article "13 propositions pour lancer le nécessaire débat sur la modernisation du MEDEF " du 13 avril 2010, il avance un certain nombre de pistes de réflexion pour améliorer / développer / modifier des règles et pratiques au sein du MEDEF dans le cadre des prochaines élections dont nous commençons à entendre parler dans la presse. Monsieur Lanxade propose l’organisation de " Primaire des Challengers ", assorti d’un débat d’idées de chacun des candidats en lice.
Je ne répèterais pas ici mon souhait de voir des syndicats puissants, qu’ils soient patronaux ou de salariés, car il est absurde de penser paritarisme et dialogue social si l’une ou l’autre des parties est endémiquement faible. Il faut justement que l’une et l’autre soient fortes pour pouvoir créer un vrai rapport de force, qui conduise à la discussion, et donc à l’aboutissement. Donc, le débat au MEDEF est intéressant, même si il ne me concerne pas directement.
On peut néanmoins reconnaître à Monsieur Lanxade d’avoir le courage de citer plusieurs fois l’économie sociale et solidaire dans son article : "Dans les quinze prochaines années, l’économie doit changer de cap, de repères, de valeurs. Elle doit remettre l’Homme et le travail indépendant au cœur du système et associer au mieux, business et performance, valeurs sociales et éthique.", il propose au MEDEF de "donner une place plus importante à l’Économie Sociale et Solidaire dite ESS et d’en promouvoir la représentation" ou "Inspirons nous du dispositif législatif américain mis en place en 1977 et qui depuis a fait ses preuves, pour créer un " CRA (Community Reinvestment Act) à la française " qui viserait à inciter les banques à prêter et investir une partie de leurs actifs de manière responsable et pérenne (rentable) sur des territoires défavorisés, au service d’entreprises et de personnes souvent exclues du système bancaire" ou encore "Systématisons les clauses sociales et environnementales dans les marchés publics et valorisons tout particulièrement les actions dans ce domaine qui sont soutenues par les PME."
L’article de Rémi Laurent reprend les différents points de l’article de Thibault Lanxade et je ne les détaillerai donc pas, il suffit d’aller sur l’un ou l’autre des articles. Mais je détaillerai le commentaire que j’ai fait à la suite de l’article de Rémi Laurent. L’appel du pied de Thibault Lanxade dans son article ne se fait que sur un aspect de l’économie sociale. Bien moderne, bien dans l’air du temps, bien "politiquement correct",... Les bonnes pratiques ! Certes, bien entendu, les pratiques doivent, peuvent évoluer dans les entreprises, qu’elles soient de l’ESS ou non, d’ailleurs. Et dans ce domaine, contrairement à ce que l’article peut laisser paraître, l’ESS n’est pas forcément l’exemple si parfait décrit là. sauf que...
Comment remettre l’Homme et le travail au cœur du système sans changer le système ? Ou du moins, le modifier suffisamment pour qu’une partie de l’économie nationale ne serve pas à réparer les dégâts de l’autre partie !? En effet, si on n’aborde pas "l’entreprendre autrement" sans la question de la gouvernance économique, sans la question de la répartition du pouvoir et des dividendes, on jette de l’eau dans la mer ! [1]. N’oublions pas que l’économie sociale historique, voire même une partie de cette économie solidaire née il y a 30 ans, s’est construite en opposition à ce capitalisme de la révolution industrielle du 19°. Les mutuelles d’assurance se sont construites par les assurés eux mêmes car ils n’arrivaient pas à s’assurer correctement avec des tarifs abordables pour leurs risques ! Les coopérateurs le sont devenus aussi parce que les entreprises coulaient sans repreneur osant prendre des risques sans garantie d’une rétribution satisfaisante de son capital investi ? Les finances solidaires reposent bien sur le fait qu’une certaine partie de la population n’a plus accès aux emprunts commerciaux pour se lancer dans l’économie ?!
Alors, bien entendu, il faut réfléchir aux bonnes pratiques, et toutes les bonnes volontés sont à mettre autour de la table, ensemble, petits et grands, riches et moins riches, car la capacité des salariés à produire est d’autant plus grande que l’entreprise leur trouve une place juste et respectueuse.
Mais ne versons pas dans la joie de liaisons devenues respectueuses entre le capitalisme [2] et l’économie sociale, les zones de discussions existent, les progrès sont à faire des deux côtés, mais les fondamentaux ne peuvent pas être occultés, c’est le principe de différenciation qui permettra de conforter l’éthique et les pratiques. Tous ceux qui se sont banalisés l’ont payé cher.
Les statuts juridiques historiques de l’économie sociale garantissent un minimum. Et les dérives sont encore possibles, certes.
Or les bonnes pratiques ne reposent que sur des chartes ou des contrats, donc sur une volonté de gré à gré, alors que ma vision de l’évolution des choses dans le travail ne peut passer que par la contrainte, parce que le code du travail est profondément inégalitaire. Pourtant la contrainte peut être une forme collective d’acceptation ! Parce que la démocratie aura justement pris la décision de la contrainte => démocratie de l’organisme (AG, CA, ...) ou démocratie de la société (Loi, décret, ...). C’est un peu ce qu’on tente de nous vendre comme un "canada dry" : l’entrepreneuriat social [3]. Comme le "canada dry" qui ressemblait à ..., l’entrepreneuriat social ressemble à s’y méprendre à l’économie sociale [4]. Je vous invite à (re)lire mon article "Contrat ou loi ? Entrepreneuriat social ou économie sociale par le statut ?" dans lequel j’expose mon refus de baser "l’entreprendre autrement" sur la notion simple de contractualisation.
On ne peut baser une démarche de transformation de la société sur la simple volonté additionnée des individus, il faut à un moment l’intervention du collectif [5], privé ou public, qui verra l’intérêt général et non l’intérêt des individus les plus puissants.
[1] Nouveau proverbe, vous pouvez noter le copyright !
[2] qu’il soit financier ou familial
[3] Vous sentiez qu’elle arrivait hein, ma diatribe !
[4] Pour une partie, l’un et l’autre sont communs, mais des éléments de différenciation existent bel et bien !
[5] qui est différent de la somme des individus le composant, cf la sociologie et la psychosociologie
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