Pourquoi je suis contre la peine de mort !
Date de publication :
30 juin 2022 |
Mots clés :
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Date de publication :
30 juin 2022 |
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Le 23 mars 1944, les corps sans vie de Betty June Binnicker (11 ans) et Mary Emma Thames (8 ans) sont retrouvés dans le comté de Clarendon de Caroline du Sud. Ils sont retrouvés près de la maison de George Junius Stinney Jr, 15 ans, afro-américain, dans laquelle l’adolescent vit avec ses parents.
Le lendemain, George Junius Stinney Jr est accusé du double meurtre par la justice et incarcéré. Malgré l’absence de toute preuve matérielle, le chef d’accusation est homicide volontaire avec préméditation, soit la charge la plus lourde dans les cas d’homicide.
Le 24 avril, un mois après son incarcération, le tribunal du comté se réunit pendant 5h. Le jury est exclusivement blanc et prend sa décision en 10 minutes, reconnaissant coupable le jeune l’adolescent noir [1], toujours sans aucune preuve. La sentence dans ce cas est la peine de mort [2]. La loi de Caroline du Sud juge alors tous ceux au-dessus de l’âge de 14 ans en tant qu’adulte. 14 ans ! L’âge auquel on peut conduire un cyclomoteur en France, l’âge auquel on rentre en 4ième au collège !
La réquisition de la peine capitale est possible pour plusieurs crimes mais n’est utilisée que pour les homicides. Le ou les crimes doivent avoir été commis avec des circonstances aggravantes ou en réunion. L’éventail des circonstances aggravantes est très large et très différent selon les États (34 en Californie, 22 au Colorado). C’est le procureur, élu ou nommé par des élus, qui détermine si le crime est passible de la peine de mort. Le choix de requérir la peine capitale dépend de critères aléatoires tels que les circonstances prises en compte, la localisation du crime ou le procureur en charge de l’affaire.
Le gouverneur de Caroline rejette les demandes de sursit ou de clémence. Il répond que le jeune a admis les faits. Et ils sont particulièrement horribles "Il est peut-être intéressant de savoir que Stinney avait tué la plus petite des filles et violé la plus grande. Puis il a tué la grande fille et violé son cadavre. Vingt minutes plus tard, il est revenu et a de nouveau tenté de la violer, mais son corps était trop froid. Il admit tout cela.".
Les parents du garçon de 14 ans ont été menacés et empêchés d’être présents dans la salle d’audience. Ils ont été expulsés de cette ville. Avant l’exécution, George a passé 81 jours en prison sans pouvoir voir ses parents, en isolement cellulaire, à 80 miles de sa ville [3].
Moins de 3 mois après le crime [4], le soir du 16 juin 1944, l’adolescent est exécuté par électrocution sur la chaise électrique. Il est si petit qu’il faudra un gros livre pour le mettre à hauteur sur la chaise électrique. Et le masque, adapté aux visages des adultes, tombera de son visage pendant l’électrocution.
La sœur de George Stinney Jr a porté le fer pendant des années pour rétablir l’honneur de son frère. 70 ans plus tard, la juge du tribunal des recours a estimé que la procédure n’avait pas respecté les droits de Georges Stinney Jr et a cassé le jugement. Elle a estimé qu’il « pourrait bien avoir commis ce crime » mais s’est prononcé sur le procès. Elle a pointé les multiples anomalies du procès, entre autres que ses aveux avaient probablement été forcés et donc irrecevables. Elle a ajouté que l’exécution d’un jeune homme de 15 ans constitue une « peine cruelle et inhabituelle ». L’étude du procès a de nouveau permis de mettre en lumière l’absence de preuves, mis à part les aveux manifestement arrachés à l’adolescent de 15 ans. La famille des jeunes filles a par contre été attristée par la décision, convaincue de la culpabilité du jeune noir.
Pour ma part, je ne sais pas si George Junius Stinney Jr était coupable. Peut-être. Peut-être pas. Ce qui est dramatique par contre, c’est que le doute subsiste terriblement et qu’un contexte (Raciale, sociologique, politique,...) ait pris manifestement le pas sur la justice. Je ne juge pas le fond, car je ne connais pas l’affaire. Mais la peine de mort a supprimé toute possibilité de réelle justice. Si George Junius Stinney Jr n’était pas le coupable, le vrai court toujours, et a pu vivre sa vie tranquillement.
Et peut-être qu’il était blanc en plus !
La justice est impartiale !
L’ exemple de George Stinney Jr est un parmi d’autres. Et aux Etats-Unis me direz vous ! certes. Mais il faut savoir qu’aux USA, comme en Europe, la peine de mort s’applique (s’appliquait pour l’Europe) plus aux populations défavorisées. Moindre capacité à comprendre la situation, moindre pouvoir économique pour recruter les bons avocats, dispositions sociétales à chercher le pauvre plutôt que le riche comme coupable, il est certain que le pauvre n’a pas le même traitement devant la justice que le riche. La population afro-américaine est de 12% aux États-Unis. Or, les détenus du couloir de la mort sont à 42% afro-américains, 43% blancs, 13% latinos et 2% autres. L’appartenance ethnique des victimes démontre une réelle discrimination. Alors que le nombre de victimes de meurtres afro-américaines et blanches est égal. L’extrême droite le traduit, elle, par, les immigrés sont plus enclins à voler et tuer.
La peine de mort est dissuasive !
Toutes les études démontrent que la peine capitale n’a aucun effet dissuasif sur les crimes violents et ne rend pas la société plus sure. Aux USA, les États ayant aboli la peine de mort ont des taux d’homicides égaux ou plus bas que la moyenne nationale. De toute façon, quand on s’apprête à commettre un crime, on ne pense probablement pas à se faire attraper, donc les individus ne se sentent pas concernés par la menace de la peine de mort.
La justice prend les précautions !
Aux USA, de 1973 à 2018, 164 personnes ont été innocentées, après en moyenne 11,3 ans dans le couloir de la mort.
Les analyses ADN ont fortement fait progresser les procédures : 21 ont été innocentées grâce à des preuves ADN.
Mais les révisions se battent avant tout contre le temps. De sérieux doutes sur la culpabilité d’au moins une dizaine de condamnés qui ont été exécutés demeurent.
Justice divine versus justice des hommes !
La justice divine est le fait que chaque être est créateur de sa réalité. Le divin ne connaît pas le jugement. Les actes des êtres reposent sur le libre arbitre et seul le jugement dernier permettra d’accueillir ou non, l’individu au paradis, ou au contraire, de l’envoyer au purgatoire ou en enfer.
La justice des hommes est apparue à l’antiquité, même si les philosophes y réfléchissaient depuis longtemps. Le fait est que la justice soit prononcée par des hommes entraînent irrémédiablement la prise en compte de la faiblesse de l’homme. Il peut se tromper. Et même à plusieurs, parce que nous sommes faillibles, le jugement est forcément potentiellement une erreur.
[1] En 2005, un jugement de la Cour Suprême des États-Unis, dans l’affaire Roper v. Simmons, a aboli la peine de mort pour les personnes de moins de 18 ans. La Cour a conclu que : « Les mineurs ayant un sens de la culpabilité atténué, ils ne méritent pas autant qu’on leur applique les peines les plus sévères ». L’arrêt Roper reconnaît que les enfants manquent de maturité, que leur sens des responsabilités n’est pas totalement développé, qu’ils sont vulnérables aux mauvaises influences et aux pressions extérieures et que leur caractère n’est pas complètement formé. Pour ces raisons, ils ne sont pas classables « dans la catégorie des pires délinquants » auxquels on réserve les traitements les plus sévères. Entre 1977 et 2005, 22 personnes de moins de 18 ans au moment des faits ont été exécutées aux États-Unis.
[2] La condamnation à mort est prononcée uniquement sur verdict unanime d’un jury populaire de douze personnes
[3] Les condamnés à la peine capitale ont été majoritairement mal défendus. 95% se voient attribuer un avocat commis d’office et même parfois ce sont des avocats radiés du barreau qui sont réquisitionnés
[4] En 1990, le délai moyen de détention dans le couloir de la mort avant d’être exécuté était de 7,9 ans, en 2000 le délai était de 11,4 ans et en 2010 le délai était de 14,8 ans
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