Pourquoi les femmes gagnent moins que les hommes dans les entreprises sociales
Date de publication :
20 décembre 2012 |
Mots clés :
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Date de publication :
20 décembre 2012 |
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J’ai commis cet article suite à la sollicitation de Florence Alonso, journaliste animant l’espace "Du business et du sens" sur le site de l’Express. C’était une suite de la rencontre avec Isabelle Hennebelle, Chef de la rubrique emploi et Rédactrice en chef des hors-séries à l’Express, qui avait animé la table ronde sur le sens du travail en ESS à laquelle j’avais participé.
Vu que j’ai commis ce texte, je vous le soumets également. Il a beaucoup buzzé sur les réseaux, a été bien lu sur notre site également. Le sujet est intéressant, la contrainte (que j’ai explosé) du nombre de caractère ne m’a pas permis de tout dire, mais je suis sûr que l’invitation à réécrire est ouverte.
Malgré un taux de féminisation élevé, les écarts de salaire entre hommes et femmes cadres sont de mises dans l’économie sociale et solidaire. Guillaume Chocteau, délégué général de Ressources Solidaires, tente d’apporter les raisons de cette inégalité.
Pourquoi les écarts de salaire entre hommes et femmes cadres, observés dans l’ensemble du secteur privé, se retrouvent-ils également dans l’ESS -alors même que le taux de féminisation y est très élevé ?
Je ne serais pas celui qui jettera l’anathème sur le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS), suite à l’enquête de l’Agence pour l’emploi des cadres (Apec) sur les salariés de l’ESS. Mais légitimement, nous pouvons nous interroger : pourquoi les écarts de salaire entre hommes et femmes cadres, observés dans l’ensemble du secteur privé, se retrouvent-ils également dans l’ESS -alors même que le taux de féminisation y est très élevé ?
Le salaire des hommes cadres est, dans l’ESS, supérieur, en moyenne, de 21% à celui des femmes cadres, soit un écart identique à celui observé pour les cadres du privé.
La première constatation est que la déclaration de la vertu ne suffit pas, malheureusement. Les bonnes intentions n’ont pas plus permis dans l’ESS que dans les sociétés capitalistes d’apprécier les compétences sans prendre en compte la sexualité du détenteur. Il est complexe de savoir réellement pourquoi un tel écart, mais on peut néanmoins dresser des pistes de réflexion.
L’économie sociale et solidaire est coupée en deux
L’enquête de l’Apec avance l’idée de parcours différencié entre hommes et femmes. Certes, mais il faut aller plus loin. L’économie sociale et solidaire est coupée en deux : une économie sociale instituée, institutionnelle, puissante économiquement, intervenant sur les mêmes marchés que les concurrents capitalistes. Et une économie sociale moins instituée, moins puissante économiquement, relevant de missions d’intérêt général, proche des territoires.
Dans la première, la structuration sera proche de l’économie capitaliste, à activité et taille égales, la politique de ressources humaines sera (quasi) identique, avec ses points forts et ses points faibles. C’est aussi ici qu’on trouvera une meilleure application (paradoxalement avec la problématique) des conventions collectives. On peut y trouver les moyens de la stratégie et de l’opérationnel. La gestion des ressources humaines est faite par des professionnels, formés dans les mêmes écoles. La politique de management existe et se calque fortement sur le management des sociétés de capitaux. La plus value se trouve peu dans un management différencié, mais plutôt, dans des budgets formation plus importants.
L’assurance Mutuelle des Motards en est un exemple. L’entreprise a reçu le prix de l’égalité hommes-femmes en 2008. Elle compte près de 60% de femmes parmi ses collaborateurs, a atteint la parité chez les cadres et poursuit ses efforts de réduction de l’écart salarial : 7% chez les cadres et 2,5% chez les employés. Mais on le voit : même une politique volontariste ne permet pas de gommer totalement les écarts.
Dans l’économie sociale moins instituée, c’est la notion de "cadre" qu’il faut interroger. Des postes mériteraient d’être cadre, mais faute de financement, sont sous-positionnés. Ce qui provoque à l’inverse, ce que nous appelons "l’intériorisation de la contrainte" qui fait qu’à budget contraint, le salarié ne revendiquera pas une meilleure reconnaissance de ses compétences. Il ira les exprimer ailleurs quand le degré de frustration sera dépassé.
Un dialogue social très faible, faute de présence syndicale structurée
Nous sommes sur un secteur de services, très proche de l’économie domestique, fortement féminisée et aux financements difficiles et externes (subventions, conventionnements...), avec un dialogue social très faible, faute de présence syndicale structurée et souvent en dessous des seuils légaux de représentation. La première priorité est de payer les salariés, et si on peut aller plus loin, tant mieux. La taille des structures, majoritairement associative, permettra difficilement une politique RH.
Nous avons donc d’un côté un pan de l’économie sociale qui pratique des politiques de ressources humaines (RH) proches de celles du secteur capitaliste. Il subit les mêmes influences et les mêmes contraintes. Et de l’autre, un pan qui peine à reconnaître le statut de cadre, soit par culture, soit par économie.
Alors que faire ? La politique de gestion RH ne peut être déconnectée des courants sociétaux. Les avancées sur l’image des femmes, la place du père et les relations hommes-femmes dans la société ne pourront que permettre le développement de politiques RH égalitaires et la disparition des écarts salariaux. Le tout suivi par les partenaires sociaux dans le cadre des concertations transversales. Et par des réflexions et des actions sur un management différent des entreprises non lucratives ou lucratives restreintes. Car on ne gère pas une entreprise d’ESS comme les autres...
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