INTERVIEWFresque polémique: «Il y a une grande tolérance à l'égard des attaques sexistes sur les réseaux sociaux»

Fresque polémique: «Il y a une grande tolérance à l'égard des attaques sexistes sur les réseaux sociaux»

INTERVIEWUne porte-parole de l'association va déposer plainte après avoir reçu des messages vindicatifs depuis qu'Osez le féminisme a dénoncé cette fresque au CHU de Clermont-Ferrand...
Paris le 23 mai 2013. Rassemblement anti sexiste devant les galeries Lafayette du collectif des Effronte-es et de Osez le feminisme suite a des animations Glam Chic avec des mannequins denudes vivants pour inaugurer le nouveau rayon lingerie.
Paris le 23 mai 2013. Rassemblement anti sexiste devant les galeries Lafayette du collectif des Effronte-es et de Osez le feminisme suite a des animations Glam Chic avec des mannequins denudes vivants pour inaugurer le nouveau rayon lingerie. - A. Gelebart / 20 Minutes / 20 Minutes
Oihana Gabriel

Propos recueillis par Oihana Gabriel

La salle d’internat du CHU de Clermont-Ferrand qui arborait une fresque figurant un viol a été recouverte. La polémique en revanche n'est pas près de se calmer. Depuis mardi, l'association féministe Osez le féminisme se dit harcelée par des internautes qui envoient emails, sms, tweets insultants. 20 Minutes a joint une porte-parole, Claire Serre-Combe.

>> Une polémique à côté de la plaque: un médecin explique la tradition des fresques en salle des internes.

Comment avez-vous découvert la fresque au CHU de Clermont-Ferrand?

Elle nous a été signalée par des internautes dimanche matin. Cette fresque, extrêmement violente, représente un viol collectif d’une femme avec des bulles «Tiens la loi santé!» «Prends la bien profond»… On a demandé dimanche le retrait de cette fresque et que la personne qui l’avait posté sur la page facebook «Les médecins ne sont pas des pigeons» soit sanctionnée. Dès le lendemain, le conseil de l'ordre des médecins de Puy de Dôme a convoqué une réunion et demandé que la fresque soit recouverte. Mais depuis mardi, on fait face à un déferlement de haine de la part d’internautes. Qui ont appelé à harceler téléphoniquement l’autre porte-parole, Anne- Cécile Mailfert. Elle a pris contact avec un avocat et elle attend ses instructions pour déposer une plainte.

Est-ce que vous êtes également visée?

Oui, ils ont posté ma photo et mon nom sur leur page ce midi. En six ans d’existence, nous avons mené des combats très durs, mais c’est la première fois que nous sommes harcelées ainsi. On croise le fer sur le terrain des idées, là on fait face à des médecins qui nous insultent. Ça fait trois jours qu’une corporation s’organise pour nous pourrir la vie.

Est-ce que vous pensez que ça révèle quelque chose sur l’état d’esprit des médecins?

On nous explique qu’on ne comprend par l’humour carabin! Heureusement on a reçu des messages de soutien de médecins, femmes et hommes. Une femme a expliqué combien il a été dur quand elle était étudiante de faire face à ce sexisme. S’il y a autant de réactions, c’est qu’on a touché du doigt quelque chose de sensible et on ne va pas se laisser intimider.

Est-ce que ça signifie qu’une partie des médecins pensent qu’on peut rire du viol?

Dans les nombreux emails, tous nous disent que le viol c’est mal. Mais l’humour carabin est misogyne et machiste. Si ça peut permettre de libérer la parole des femmes qui subissent cette misogynie quotidienne, tant mieux.

Cette polémique arrive en plein débat sur la liberté d’expression après la tuerie de Charlie Hebdo

Il faudrait que les médecins qui défendent cette fresque arrêtent de se prendre pour les héros de la liberté d’expression. Là on n’est pas dans le registre de la caricature politique ou satirique.

Est-ce que la réponse du ministère est satisfaisante?

Marisol Touraine s'est dit «choquée» et on espère qu'elle va contrer cette attaque sexiste. L'association est montée au créneau non pas pour défendre la loi Santé mais parce qu’une femme politique a été attaquée à travers une fresque qui dépeint un viol. A ceux qui disent qu’avec les féministes on ne peut rire de rien, nous répondons qu’aujourd’hui 86.000 femmes sont violées en France. On est dans une société où les femmes sont lésées.

Est-ce que vous avez l’impression que les féministes sont particulièrement ciblées sur les réseaux sociaux?

Non, c’est par vague. Autant les gens ont compris qu’on ne peut pas tenir des propos racistes, autant il y a une grande tolérance sur le sexisme. Si cette fresque avait été à portée raciste ou antisémite, elle aurait fait un tollé.

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